Épisode dépressif caractérisé (hors sujet âgé)

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Adulte
Enfant
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Mise à jour
Février
2025

Tableau 1 - Dépistage d'un épisode dépressif caractérisé (EDC)
Dépistage de l'épisode dépressif : PHQ-2
Au cours du dernier mois :
  • Avez-vous éprouvé peu d'intérêt ou de plaisir à faire les choses ?
  • Vous êtes-vous senti triste, déprimé ou désespéré ?

≥ 1 réponse positive : évocateur d'épisode dépressif caractérisé (EDC). Faire le PHQ-9 (voir tableau 3).

Dépistage chez le sujet âgé
GDS-15 (Geriatric Depression Scale, utilisation courante mais faible niveau de preuve) (PDF).

 

Tableau 2 - Démarche diagnostique
Diagnostic positif (adapté du CIM-10 et du DSM-5)
Diagnostic positif = présence de tous les critères A à G.
A

Au moins 4 des symptômes suivants, tous ou presque présents tous les jours, presque toute la journée : 

  • Au moins 2 symptômes dépressifs principaux :
    • Humeur dépressive : tristesse et/ou sentiment de vide et/ou pleurs (presque tous les jours),
    • Diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir : pour toutes ou presque toutes les activités,
    • Perte d'énergie, augmentation de la fatigabilité,
  • ET au moins 2 symptômes dépressifs supplémentaires :
    • Perte d'appétit,
    • Baisse de la confiance en soi,
    • Sentiment de culpabilité, d'inutilité,
    • Perspectives négatives et pessimistes pour le futur,
    • Troubles du sommeil,
    • Diminution de la capacité d'attention et de concentration,
    • Pensées de mort récurrentes ou idées suicidaires.
BÉvolution ≥ 2 semaines.
CConstitue un changement par rapport à l'état antérieur.
DSymptômes induisant une détresse cliniquement significative et/ou altérant le fonctionnement.
ESymptômes non attribuables à une origine organique ou toxique (voir ci-après).
FÉpisode ne répondant pas aux critères diagnostiques d'un trouble psychotique.
GIl n'y a jamais eu d'épisode maniaque ou hypomaniaque.
Évaluation du risque suicidaire
Questionnaires

Risque suicidaire élevé si

  • Question 9 du PHQ9 >= 2 (score),
  • Columbia-Suicide Severity Rating Scale >= 3 (score, en anglais).
Exemples de questions à poser
  • Avez-vous déjà pensé à vous faire du mal ? Si oui, de quelle façon ?
  • Pensez-vous que votre vie ne vaut pas la peine d’être vécue ?
  • Souhaiteriez-vous être mort ?
  • Avez-vous déjà pensé à mourir ?
  • Avez-vous fait des plans pour mettre fin à vos jours ?
  • Avez-vous à votre disposition les moyens pour faire cela ?
  • Qu’est-ce qui vous retient de mettre en œuvre ces pensées ?

Le fait de poser ces questions ne renforce pas le risque suicidaire.

Le risque suicidaire doit être réévalué régulièrement.

Urgence faible
(traitement ambulatoire possible)
  • Relation de confiance établie avec un praticien,
  • Désir de parler et recherche de communication,
  • Recherche des solutions à ses problèmes,
  • Pense au suicide mais n’a pas de scénario suicidaire précis,
  • Pense encore à des moyens et à des stratégies pour faire face à la crise,
  • N’est pas anormalement troublé mais psychologiquement souffrant.
Urgence moyenne
(soins psychiatriques spécialisés ambulatoires ou hospitaliers)
  • Présente un équilibre émotionnel fragile,
  • Envisage le suicide et dont l’intention est claire,
  • A envisagé un scénario suicidaire mais dont l’exécution est reportée,
  • Ne voit de recours autre que le suicide pour cesser de souffrir,
  • A besoin d’aide et exprime directement ou indirectement son désarroi,
  • Est isolé.
Urgence élevée
(hospitalisation en ambulance +/- sous contrainte)
  • Décidé : le passage à l’acte est planifié et prévu pour les jours qui viennent,
  • Coupé de ses émotions, rationalisant sa décision ou très émotif, agité, troublé,
  • Complètement immobilisé par la dépression ou dans un état de grande agitation,
  • Dont la douleur et la souffrance sont omniprésentes ou complètement tues,
  • Ayant un accès direct et immédiat à un moyen de se suicider,
  • Ayant le sentiment d’avoir tout fait et tout essayé,
  • Très isolé.
Autres signes d'alertes
  • Tentative de suicide récente et/ou hospitalisation en psychiatrie récente (très haut risque),
  • Âge avancé (>75 ans),
  • Syndrome présuicidaire de Ringel : Ces signes ne sont pas rassurants et cachent un envahissement fantasmatique par des idéations suicidaires (urgence élevée) :
    • Attitude de retrait,
    • Diminution de la réactivité émotionnelle,
    • Diminution de la réactivité affective,
    • Diminution de l'agressivité,
    • Diminution des échanges interpersonnels.
Éliminer les diagnostics différentiels
Clinique
  • Recherche d'une prise de toxiques ++ : alcool, cannabis, amphétamines, cocaïnes, hallucinogènes...,
  • Recherche d'argument pour un autre trouble psychiatrique : trouble psychotique, trouble bipolaire, personnalité état-limite, trouble anxieux, addictions,
  • Enquête médicamenteuse : corticoïdes, finastéride interféron, β-bloquants...,
  • Examen neurologique : tumeur, SEP, démence, AVC,
  • Recherche de signes évocateurs d'une pathologie endocrinienne : hypoglycémie, troubles ioniques, dysthyroïdie, hypercorticisme, maladie de Wilson...
Paraclinique
  • Indication : surtout en cas de début aigu ou de point d'appel clinique,
  • Biologique sanguin (ordonnance) :
    • Glycémie,
    • Ionogramme,
    • Calcémie,
    • Créatinine,
    • NFS,
    • CRP,
    • TSH,
    • Bilan hépatique,
  • Toxiques urinaires : 
    • Cannabis,
    • Cocaïne,
    • Opiacés,
    • Amphétamines,
  • Autres : IRM, EEG.

 

Tableau 3 - Évaluation de la sévérité
Critères HAS
  Nombre de symptômes
(voir tableau 2, critère A)
Retentissement fonctionnel
Épisode dépressif léger2 symptômes principaux +
2 symptômes supplémentaires
Retentissement léger sur le fonctionnement : quelques difficultés à poursuivre les activités ordinaires et les activités sociales, mais celles-ci peuvent être réalisées avec un effort supplémentaire.
Épisode dépressif modéré2 symptômes principaux +
3-4 symptômes supplémentaires
Le dysfonctionnement pour les activités se situe entre ceux précisés pour l’épisode léger et l’épisode sévère.
Épisode dépressif sévère3 symptômes principaux +
≥ 4 symptômes supplémentaires
Les symptômes perturbent nettement les activités professionnelles, les activités sociales courantes ou les relations avec les autres. Par exemple : difficultés considérables ou incapacité à mener le travail et/ou les activités familiales et sociales.
Autres échelles d'évaluation de la sévérité
Échelle de Hamilton
(calculateur, MG France)
  • Classification des symptômes en :
    • Légers (score 10-13),
    • Légers à modérés (score 14-17),
    • Modérés à sévères (score ≥ 18).
PHQ-9
(calculateur)
  • 0-4 : Pas de dépression ou très modérée,
  • 5-9 : Dépression légère,
  • 10-14 : Dépression modérée,
  • 15- 19 : Dépression modérément sévère,
  • 20-27 : Dépression sévère.

 

Tableau 4 - Prise en charge de l'épisode dépressif caractérisé
Indications
Épisode dépressif léger
  • Éducation,
  • Psychothérapie structurée (voir ci-après) +/- psychothérapie de soutien,
  • Pas d'antidépresseur,
  • +/- Avis spécialisé d'emblée ou en cas d'aggravation.
Épisode dépressif modéré
  • Éducation,
  • Psychothérapie structurée (voir ci-après) +/- psychothérapie de soutien +/- psychothérapie structurée,
  • Antidépresseur à discuter,
  • +/- Avis spécialisé d'emblée ou en cas d'aggravation.
Épisode dépressif sévère
  • Antidépresseur d'emblée,
  • Avis spécialisé rapide.
Situations particulières
  • Grossesse, post-partum, présence de caractéristiques mélancoliques, psychotiques ou catatoniques, suspicion de trouble bipolaire (voir tableau 5),
  • Avis spécialisé rapide.
Traitements
Éducation
(version imprimable)
  • Respecter le rythme nycthéméral,
  • Éviter la consommation d’alcool et autres substances toxiques,
  • Encourager une activité sociale régulière,
  • Poursuivre les activités habituellement intéressantes ou plaisantes,
  • Pratiquer une activité physique régulière : pour une dépression légère à modérée, un programme d’AP adaptée (voir fiche d'aide à la prescription) sur 3 mois est aussi efficace sur la symptomatologie dépressive et le taux de rémission qu’un traitement médicamenteux ou qu'une psychothérapie.
Antidépresseurs
Généralités
  • Délai d'efficacité de 2 à 4 semaines et efficacité maximale en 6 à 8 semaines, à expliquer au patient,
  • Durée : poursuivre le traitement 6 mois à 1 an après la rémission,
  • Arrêt progressif,
  • Ajout d'une benzodiazépine dans les 2 premières semaines en cas d’anxiété, d’agitation ou d’insomnies invalidantes,
  • Augmentation progressive des doses d’anti-dépresseur : débuter à ⅓ ou ½ dose et augmenter en 1 ou 2 paliers pour atteindre la posologie minimale de la fourchette recommandée en 1 ou 2 semaines (l’intérêt des posologies plus élevées est incertain),
  • Information du patient :
    • Nécessité de ne pas arrêter seul le traitement,
    • Possibilité d’apparition d’idées suicidaires en début de traitement (surtout patients jeunes),
  • Choix de la molécule :
    • Efficacité similaire mais tolérance variable,
  • Chez le sujet âgé, éviter les molécules avec effet anticholinergique important (paroxetine, tricycliques).
Bilan préthérapeutique
  • +/- Biologique (ordonnance) : NFS, ionogramme, glycémie, bilan lipidique, créatinine, bilan hépatique, β-HCG, TSH,
  • ECG si antécédent ou suspicion de maladie cardiovasculaire (avec mesure du QT).
1ère intention
  • ISRS (ordonnance de sertraline. En cas de réponse insuffisante la posologie peut être augmentée par paliers de 50 mg d'au moins 7 jours, sans dépasser 200 mg/j),
  • La sertraline et l’escitalopram sont les deux antidépresseurs ayant la meilleure efficacité et tolérance. Les autres traitements les mieux tolérés sont : le citalopram, la fluoxétine, la vortioxetine.
2ème intention
  • IRSNa, ou
  • Miansérine, ou
  • Mirtazapine, ou
  • Vortioxetine.
3ème intentionAntidépresseur tricyclique
Psychothérapie
De soutienPeut-être réalisée par le médecin généraliste, un psychiatre ou une psychologue.
Structurée

Les thérapies ayant les niveaux de preuve les plus élevés sont les TCC et les thérapies interpersonnelles :

  • Thérapies cognitivo-comportementales (TCC) dont l’objectif est d’identifier et d’interrompre les pensées et comportements négatifs,
  • Thérapies interpersonnelles dont l’objectif est d’augmenter le soutien social,
  • Psychothérapies psychodynamiques ou d’inspiration analytique,
  • Activation comportementale dont l’objectif est la planification d'activités positives,
  • Thérapie de résolution de problèmes dont l’objectif est d’avancer par petites étapes spécifiques,
  • Thérapies basées sur la pleine conscience.
Suivi
  • Suivre de manière rapprochée initialement pour juger de la tolérance du traitement et créer une relation thérapeutique fréquence proposée à 2 semaines puis toutes les 4-6 semaines jusqu’à rémission,,
  • Réévaluer régulièrement le risque suicidaire avec vigilance particulière au cours des premières semaines d’introduction/majoration de dose de l’antidépresseur(voir tableau 2),
  • En l’absence d’efficacité :
    • Ajouter une  psychothérapie structurée, ou
    • Changer de molécule (dans la même classe d'antidépresseur ou une autre) : introduire le nouveau médicament en augmentant la posologie sur 2-3 semaines puis arrêter progressivement l’ancien antidépresseur en 4 à 6 semaines; ou 
    • Ajouter un 2ème antidépresseur (mirtazapine) ou un autre médicament (neuroleptique),
  • Poursuivre l'antidépresseur 6 mois à 1 an après la guérison (ou plus longtemps si dépression chronique ou sévère) et l'arrêter progressivement (sur 2-3 mois),
  • Choisir une période de stabilité sociale et affective pour initier la décroissance,
  • Prévoir une réévaluation quelques mois après l’arrêt du traitement.
Indications à une hospitalisation
  • Risque suicidaire (voir tableau 2),
  • Risque immédiat d'automutilation,
  • Potentiel de violence,
  • Symptômes psychotiques ou somatiques sévères associés,
  • Présence d’une forte agitation anxieuse avec manque de contrôle émotionnel ou impulsivité,
  • Sevrage de substance psychoactive,

Essayer d'obtenir le consentement autant que possible. Si nécessaire recourir à une hospitalisation sous contrainte (à la demande d’un tiers ou à la demande du procureur de la république si la personne présente un danger pour elle-même ou pour autrui,sont réputés “tiers”au sens de la loi Art 15 un des ascendants ou des descendants, le conjoint, les collatéraux ou le tuteur légal du malade).

 

Tableau 5 - Présentations particulières
Présentations particulières
EDC avec caractéristiques mélancoliques
  • Souffrance morale profonde, et
  • Agitation ou ralentissement psychomoteur majeur, et
  • Anhédonie et/ou anesthésie affective, et
  • Plusieurs des symptômes suivants :
    • Sentiment de désespoir voire d'incurabilité,
    • Troubles du sommeil avec réveils matinaux précoces,
    • Symptômes plus marqués le matin,
    • Perte d'appétit ou de poids significative,
    • Culpabilité excessive ou inappropriée.
EDC avec caractéristiques psychotiquesPrésence d'idées délirantes et/ou d'hallucinations.
EDC avec caractéristiques mixtes

≥ 3 symptômes maniaques ou hypomaniaques présents pendant la majorité des jours de l'épisode de l'EDC :

  • Augmentation de l'estime de soi ou idées de grandeur,
  • Réduction du besoin de sommeil,
  • Plus grande communicabilité que d'habitude ou désir constant de parler,
  • Fuite des idées ou sensations subjectives de pensées qui défilent,
  • Distractibilité (attention trop facilement attirée par des stimuli mineurs),
  • Augmentation de l'activité orientée vers un but (social, professionnel, scolaire ou sexuel) ou agitation psychomotrice (augmentation de l'activité sans but précis),
  • Engagement excessif dans des activités potentiellement dommageables (achats inconsidérés, rapports sexuels inconsidérés...).
EDC avec caractéristiques anxieusesTroubles anxieux au 1er plan. En cas d'agitation anxieuse importante le risque suicidaire est majeur (raptus anxieux).
EDC avec caractéristiques catatoniques

Ensemble de symptômes pouvant inclure :

  • Catalepsie (flexibilité cireuse),
  • Négativisme (refus permanent des consignes, suggestions et communications avec autrui),
  • Stéréotypies (phrases, attitudes, gestes, tics sans signification apparente, inlassablement reproduits),
  • Impulsions,
  • Écholalie (imitation involontaire répétée, quasi automatique et dénuée de sens, des derniers mots entendus),
  • Échopraxie (tic qui consiste, pour une personne, à reproduire de façon automatique et involontaire des gestes ou des actes exécutés devant elle par autrui).

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